la Journée internationale des Femmes:
Paris – 27 février 2016
Discours de Maryam Radjavi
Mesdames et Messieurs
Très chères sœurs,
Parlementaires, intellectuelles, éminentes personnalités et militantes du
mouvement pour l’égalité !
La journée internationale des femmes approche. Le 8 mars
est dédié aux femmes qui ont lutté et luttent pour l’égalité et la liberté, des
femmes qui se dressent pour des lendemains glorieux et un monde meilleur, et
pour qui la résignation, le désespoir et l’impuissance n’ont pas de sens.
Aujourd’hui, les femmes courageuses dans les prisons
politiques en Iran et les mères intrépides qui se sont maintes fois insurgées
devant la prison d’Evine à Téhéran, sont avec nous.
Nous saluons également les femmes d’avant-garde
iraniennes qui se sont insurgées contre deux dictatures, de l’organisation des
Fedayines du peuple et de l’organisation des Moudjahidine du peuple, et qui ont
laissé leur vie comme FatemehAmini et MarziehOskouï, jusqu’à AchrafRadjavi et
toutes les femmes qui se sont dressées contre le régime du guide suprême. Je
pense en particulier à Zahra Rajabi qui a été assassinée par des terroristes de
Téhéran il y a 20 ans en Turquie. Je pense aussi à Zohreh Ghaemi,
GuitiGuivechiniyan, Saba Haft-Baradaran, AssiehRakhchani, MahdiehMadadzadeh,
NayerehRabii et toutes mes sœurs héroïques qui ont été tuées aux camps d’Achraf
et Liberty.
Saluons aussi les femmes opprimées de Syrie qui malgré
toutes les douleurs et les souffrances sous les bombardements, sous les
attaques criminels de Daech ou dans l’exode et en exil, restent toujours
debout.Jusqu’à présent plus de 400.000 Syriens ont été tués, avec parmi eux des
groupes innombrables de femmes et d’enfants.
Mais pourquoi leurs douleurs et leur tristesse
doivent-elles durer ? Et pourquoi face aux bombardements sauvages de la Russie
et surtout aux crimes du régime iranien dans ce pays, le monde garde-t-il le
silence ?
Pour les défenseurs de la cause de l’égalité, quel devoir
plus urgent que la solidarité avec les millions de femmes prises dans le
brasier de la Syrie ?Pour nos sœurs de tous les pays, quel combat plus
important que de lutter contre la source de la guerre et du bain de sang au
Moyen-Orient, à savoir le régime du guide suprême au pouvoir en Iran ?
C’est pourquoi je vous appelle ainsi que l’ensemble des
militantes et militants du mouvement pour l’égalité dans le monde, à voler au
secours des femmes qui souffrent en Syrie, en Irak et au Yémen.
Les élections : Une compétition entre les responsables
actuels et précédents de la torture, des exécutions
Chères amies,
Hier, le 26 février, les mollahs ont tenu une parodie
électorale. Mais ce n’était pas pour élire les représentants du peuple. Les
noms des candidats rivaux montrent qu’Il s’agissait plutôt d’une compétition
entre les responsables actuels et précédents de la torture, des exécutions et
de l’exportation du terrorisme ; ce qui balaye le mythe de modération au sein
de ce régime. C’est pourquoi cette parodie s’est heurtée à l’indignation de la
majorité de la population et surtout de la jeunesse.
Avec ces élections, Khamenei veut focaliser au maximum
son régime sur la guerre en Syrie, la répression en général et celle des femmes
en particulier en Iran. Mais cela ouvre en fait une période sans précédent de
fragilité et d’usure dont le régime du guide suprême ne sortira pas indemne.
Maintenant c’est au tour du peuple iranien et nous
appelons nos compatriotes à l’intérieur du pays, en particulier les femmes et
la jeunesse courageuse, à étendre leur lutte.
Les violences faites aux femmes légalisées
Mesdames et Messieurs, Chères amies,
L’intégrisme islamiste est un cancer qui prolifère et
menace tout le monde.De telle manière que de la Méditerranée jusqu’aux rives de
l’Atlantique,partout, l’extrémisme sous le couvert de l’islam a émergé, comme
Daech, et prend les femmes pour cibles principales. Par conséquent, il est
nécessaire de connaitre la source et le foyer central de ce terrible fléau, de
trouver la solution qui le déracinera et de débattre du rôle des femmes dans
cette lutte.
C’est pourquoi aujourd’hui, je voudrais aborder un sujet
dont le monde a peu entendu parler. Il s’agit de l’oppression des femmes par le
régime iranien et la résistance qu’elles lui opposent.
En Iran depuis plus de trente ans, un régime intégriste
est au pouvoir avec pour caractéristique majeure son hostilité envers les
femmes. De telle manière que ces trente, quarante dernières années, nulle part
ailleurs qu’en Iran autant de femmes ont été exécutées, torturées ou harcelées
dans les prisons.
La misogynie inscrite dans les lois et la charia des
mollahs
Permettez-moi avant toute chose d’aborder les lois du
régime et les fondements de sa charia réactionnaire.La Constitution des
mollahs, dans son article 167, stipule que « le juge a le devoir de trouver le
jugement relatif à chaque litige dans les lois codifiées, et s’il n’en trouve
pas, de rendre un jugement de l’affaire en s’appuyant sur des sources valides
islamiques ou des décrets, des fatwas, valides. »
Cet article donne toute liberté d’action aux juges de
s’appuyer sur des fatwas religieuses pour prononcer des jugements. Mais ces
fatwas pour le régime des mollahs, ne sont autres que le livre de décrets
religieux de Khomeiny qui se nomme Tahrir al-Vassileh. Une grande partie de ce
recueil traite des moyens et des méthodes de la domination patriarcale, de
l’inégalité imposée aux femmes, du droit à la polygamie et va même jusqu’à
légitimer le traitement inhumain des femmes et des filles.
Dans ce livre, Khomeiny justifie dans plusieurs
ordonnances l’esclavage des femmes dans la charia des mollahs au 20e siècle. De
même dans des dizaines d’autres ordonnances, il donne le droit aux hommes de
prendre un nombre illimités de femmes provisoires. Encore au 20ème siècle, il
donne aux partisans des mollahs le droit de prendre des femmes comme butin de
guerre.
Dans son livre Khomeiny souligne que « certains droits
des gens sont tels qu’ils ne peuvent être prouvés que par le témoignage d’un
homme,mais le témoignage de deux femmes ne peut pas remplacer celui d’un
homme.».
Ailleurs, il écrit : « le témoignage d’une femme en soi
n’est pas acceptable. Même les témoignages d’un homme et de six femmes ne sont
pas acceptables (...) Même les témoignages de huit femmes ne sont pas
acceptables. »
Dans ce livre, Khomeiny justifie l’exploitation sexuelle
des fillettes de moins de 9 ans et même des tout-petits. Il délivre aussi toute
une série d’ordonnances sur le mariage des filles mineures. Et dans d’autres
ordonnances, il réduit le mariage des femmes à un contrat commercial, insultant
leur dignité.
On peut se faire une idée claire de l’usage de la
violence et du viol contre les femmes dans le rapport sur l’Iran de Mme
YakinErtük, rapporteuse spéciale de l’ONU sur les violences faites aux femmes,
publié en 2005 et qui montre le fruit de cette charia obscurantiste. De même,
l’usage à grande échelle de la drogue et la misère qui dévore femmes résultent
aussi de cette même charia si corrompue. C’est pour pourquoi nous disons que le
régime du guide suprême est l’ennemi des femmes.
De plus ces trois dernières décennies, Khomeiny et ses
mollahs ont cultivé cette idéologie dans l’esprit des groupes extrémistes des
autres pays et ont généré beaucoup de ces groupes en distribuant des aides
matérielles.
Ce phénomène, surtout ces deux dernières années s’est
propagé de manière offensive dans tout le Moyen-Orient et en Afrique. Il
apparait sous des formes diverses : de Daech au Taliban jusqu’à BokoHaram et
les milices du régime iranien en Irak, au Yémen et au Liban.
Regardez comment Daech traite les femmes sous prétexte de
décrets islamiques. Regardez surtout comment il réduit en esclavage les femmes
et les filles Yézidis en Irak. Ce sont exactement les ordonnances que je viens
de vous citer en exemple dans le livre de Khomeiny.
Mais tous ces groupes, qu’ils soient chiites ou sunnites,
croient dans plusieurs éléments fondamentaux communs qui sont :
- imposer la religion de force
- appliquer les décrets de la charia des mollahs
- Rejeter les frontières, se livrer à des massacres et au
terrorisme.
- Etre hostiles à l’Occident
- Eliminer les opposants sous prétexte d’excommunication
- Surtout opprimer les femmes
- et instaurer un pouvoir tyrannique sous le nom de
califat, d’ « Etat islamique » ou de régime du guide suprême
Dans son livre intitulé « Etat islamique », Khomeiny
définit officiellement le régime qu’il entend créer, de « califat ». Mais, il
s’agit en fait d’une injustice absolue, sanguinaire et hostile aux femmes que
les mollahs au pouvoir en Iran jusqu’aux groupes comme Daech font passer pour
de l’islam.
Or, tout ce qui est contrainte et obligation et tout ce
qui rejette le vote et le libre choix populaire, non seulement ce n’est pas
l’islam mais c’est contraire à l’islam. Et tout ce qui nie l’égalité des droits
des femmes, n’a pas sa place dans l’islam. Face à l’extrémisme, l’obscurantisme
et l’instrumentalisation de la religion, nous défendons l’islam démocratique.
Nous voulons avec ce mot émancipateur d’égalité et en
particulier de participation active et égale des femmes à la direction
politique, faire de ce siècle, le siècle des femmes, une ère de libération des
femmes et de l’Humanité.
Exécution et violences faites aux femmes
Chères amies,
Le régime du guide suprême est l’ennemi des femmes parce
que son pouvoir est fait de violences et de répressions constantes contre les
femmes.
En plus de 74 formes de tortures dans les prisons
politiques, sur la base d’une fatwa ignoble, ce régime a fait violer un grand
nombre de jeunes filles avant de les exécuter. Le viol des jeunes détenus,
femmes et hommes, a pris de nouvelles dimensions lors de la révolte de 2009. Ce
régime a également exécuté des milliers de femmes en raison de leurs activités
politiques et de leur lutte.
Ici je ne peux m’empêcher de penser à FatemehMesbah qui
n’avait que 13 ans le jour de son exécution, MojganJamchidi qui avait 14 ans et
NouchineEmami qui en avait 16 quand on les a fusillées.
En ce moment, me revient le souvenir des femmes qui sont
mortes sous la torture et de celles qui ont été fusillées enceintes. Il ne
s’agit ni d’une dizaine, ni d’une centaine, ni d’un millier, mais de plusieurs
milliers de femmes qui ont été fusillées, pendues ou sont mortes sous la
torture. Des milliers de cœurs qui battaient pour la liberté et l’égalité et des
milliers de volonté de combattre, qui recélait chacune des univers de
compassion et de savoirs.
Ces dernières années, elles ont été un grand nombre à
être exécutées pour des délits de droit commun et même pour des accusations non
prouvées. Sous le mandat présidentiel du mollah Rohani, au moins 64 femmes ont
été pendues en Iran. ReyhanehJabbari, cette jeune femme courageuse exécutée
pour s’être défendue contre son violeur, et tant d’autres Reyhaneh dont nul ne connait
le nom.
Mais ne sous-estimez pas ces cris que personne n’entend.
Ne sous-estimez pas ces larmes que personne n’a vues et ces gémissements
étouffés. Ce sont les éléments d’une tempête qui finira par balayer les ennemis
des femmes.
Le voile obligatoire
Chères amies,
Un autre domaine de la violence et de la contrainte en
Iran, c’est le voile obligatoire. Les femmes en Iran dès les premières semaines
du pouvoir de Khomeiny ont protesté contre le voile imposé. A la même époque,
les femmes du mouvement des Moudjahidine du peuple ont participé activement
dans les manifestations contre le voile obligatoire.
Le mollah Rohani dans ses mémoires, reconnait avoir été –
dans sa fonction de représentant de Khomeiny au bureau politico-idéologique de
l’armée – celui qui a imposé le voile dans l’administration de l’armée et de
s’être rendu personnellement dans tous les services pour le faire entrer en
vigueur.
De même, il existe toute une série de règlements qui
restreignent les libertés individuelles et sociales des femmes en Iran. De
multiples organes spéciaux ont été mis sur pied uniquement pour combattre les
femmes jugées mal-voilées. D’après des informations officielles, en un an, les
agents ont interpellé 3,6 millions de femmes soi-disant « mal voilées » dans
les rues et en ont envoyées 18.000 devant un tribunal.
En fait, ils ont fait de l’Iran une immense prison de
femmes.
Il y a deux ans, les hommes de main du régime ont
vitriolé de nombreuses femmes dans la ville d’Ispahan et aujourd’hui encore,
des jeunes filles comme Soheila, Neda et Sara souffrent toujours de ces
brûlures. Leurs souffrances
incarnent celles de toutes les femmes d’Iran.
C’est pourquoi une fois de plus nous disons : Les femmes
iraniennes doivent être libres ! Elles doivent elles-mêmes choisir leurs
opinions, leurs vêtements et leur vie. Et nous répétons : Non au voile
obligatoire ! Non à la religion obligatoire ! Non à un gouvernement obligatoire
!
La pauvreté des femmes en Iran
Chères amies
Aujourd’hui, avec l’inégalité, l’oppression et la
répression, la pauvreté et la misère noire se sont emparées de la vie de la
majorité de la population, en particulier des femmes.
A Téhéran, des mères vendent leurs enfants avant leur
naissance pour environ 25 euros et les femmes qui dorment dans des cartons dans
les rues de Téhéran se comptent au nombre de 5000.
Mais pire que cette pauvreté qui s’étend, c’est une
politique réactionnaire qui restreint sans cesse la participation des femmes à
la vie sociale. 87% de la population non-active sontdes femmes. Plus de4
millions de femmes diplômés sont au chômage. Et ces dix dernières années, plus
de 100.000 femmes ont été exclues annuellement du marché du travail.
La participation économique des femmes n’est même pas de
13% et la participation politique des femmes dans ce régime n’a aucune
signification. Le total de femmes élues au parlement en 36 ans atteint à peine
la cinquantaine, 3% dans la législature actuelle. La mise en place de ces
interdits, sont les décisions les plus politiques et les efforts du régime du
guide suprême pour barrer la route à la participation des femmes.
C’est pourquoi je dis à mes filles et mes sœurs à travers
tout l’Iran : Vous méritez de décider de votre destin dans un Iran libéré du
régime du guide suprême. Vous et vos sœurs d’avant-garde au camp Liberty,vous
pouvez et vous devez balayer de notre région, la dictature du guide suprême,
l’intégrisme islamiste et les différents groupes qu’il a engendré ; et amener
la liberté en Iran, la paix dans la région et la sécurité dans le monde.
Les acquis de la Résistance
Mes chères sœurs,
Pour l’Iran après le renversement du régime du guide
suprême, nous avons pour programme l’instauration d’une démocratie fondée sur
la liberté, l’égalité, la séparation de la religion et de l’Etat et l’abolition
de la peine de mort.
Nous voulons que les femmes puissent jouir dans tous les
domaines de droits égaux, notamment l’égalité dans les libertés et les droits
fondamentaux, l’égalité devant la loi, l’égalité économique, l’égalité dans la
famille, la liberté de choisir ses vêtements et la participation active et
égale à la direction politique.
Les femmes de la Résistance iranienne se battent pour que
le peuple iranien, en particulier les femmes, soit libéré afin de pouvoir
décider de son destin.Le régime du guide suprême, qui pratique le monopole à
outrance, s’oppose de toutes ses forces à ce droit.
Face à lui, nous insistons sur un maximum de
participation égale des femmes à la direction politique. Cette exigence, n’est
pas juste un slogan et un programme pour l’avenir mais se fonde sur la pratique
de cette Résistance.Une résistance dont le dirigeant, grâce à une conception
profondément unicitaire, opposée à l’exploitation, a ouvert l’avancée du
mouvement de l’égalité.
La persévérance de ce mouvement est le fruit d’une
défense sans concession de la cause de la liberté et de l’égalité. En
particulier, ces trente dernières années, l’organisation des Moudjahidine du
peuple a fait de la valeur de l’égalité la base pratique de sa lutte et de ses
relations internes. Une génération de femmes de l’OMPI gère depuis des années
de grands organes de la Résistance, mettant ainsi cette valeur en application.
Par ailleurs, une génération d’hommes qui croient dans la cause de l’égalité, a
accepté l’égalité des femmes et leur rôle d’avant-garde, trouvant ainsi leur
émancipation et un nouveau sens des responsabilités. La formation du Conseil
centrale de l’OMPI avec un millier de femmes pour diriger la résistance, est un
grand pas dans cette voie. Et aujourd’hui, elles ouvrent la voie en confiant
des responsabilités à la nouvelle génération.
Le message de ce conseil central est simple : Pour chaque
travail et chaque poste, c’est écarter l’idée de « moi d’abord », mais d’être
toujours la première dans le domaine du dévouement et du sens des
responsabilités.
Au lieu de voir les faiblesses et les manques des autres,
voir leurs points forts et c’est de cette manière que l’on peut construire un
nouveau monde d’humanité.
Mes chères sœurs,
Notre plus grand capital c’est notre solidarité.Nous
devons développer la chaine de notre union, partout où il y a une oppression :
des prisons iraniennes jusqu’aux foyers de terreur au Moyen-Orient. Soyons un
nouveau message d’émancipation pour l’ensemble de l’Humanité.
Nous le pouvons et nous le devons !
Je vous remercie