La bonne manière de lutter contre l’intégrisme islamiste
Les attentats terroristes à Paris ont de
nouveau soulevé la question de savoir comment lutter contre l'extrémisme islamiste.
Ils ont également suscité un débat sur la source du problème et d'une certaine
façon si le problème est dans l'islam ou dans ceux qui abusent de la religion
de plus d'un milliard de personnes en faveur de leurs propres intérêts et
objectifs.
On aurait pu en dire autant sans doute il y a
quelques siècles du christianisme. L’inquisition a été menée sous couvert du christianisme
par ceux qui se considéraient comme les représentants de Dieu.
Alors qu'on pourrait estimer naturel certaines
réactions spontanées contre les musulmans dans leur ensemble, cette approche fournit
en fait un terrain fertile aux intégristes pour faire avancer leurs
perspectives haineuses et recruter davantage. Par conséquent, pour réussir, il
est essentiel de faire la distinction entre les terroristes et les musulmans,
mais aussi entre l'islam et ce que les extrémistes prétendent être l’islam.
En même temps, c’est aux musulmans d'être à
l'avant-garde pour dénoncer les extrémistes, et à lutter contre eux sur tous
les fronts pour éradiquer ce phénomène vicieux qui ternit leur religion. C’est
pour cela que l'OMPI, qui croit dans l’islam, n'a jamais hésité à parler d’
«intégrisme islamiste », « extrémisme islamiste » et même de terrorisme émanant
de ce phénomène. En effet, c’est l’OMPI qui en premier a publié en 1993 un
livre aux États-Unis intitulé : « L’intégrisme islamiste : la nouvelle menace
mondiale ». Malheureusement, l'avertissement n'a pas été pris au sérieux à
l’époque.
En faisant cette distinction entre l'islam et
les extrémistes, l'OMPI a pu s’opposer à Khomeiny à l'apogée de son autorité et
révéler le vrai visage de ce dictateur et des intégristes à la société iranienne.
En faisant cette distinction, l’OMPI a pu déclarer ouvertement qu'elle ne croit
pas dans les lois de la charia, qu'elle les considère contraires à l’islam. Plus
important encore, elle a influencé les autres à la suivre sur cette voie. Avec ces
conceptions et cette approche, l’OMPI a prôné avec succès la séparation de la religion
et de l'État et l'égalité des femmes et des hommes.
Pour faire cette distinction, l'OMPI n'a pas
demandé aux musulmans de renoncer à leur religion ou d’en changer le contenu,
mais plutôt il leur a offert le message authentique de l'islam. Il montre aux musulmans
que l'islam ne signifie pas l’application à la lettre de règles conçues il y a
14 siècles, mais plutôt qu’un engagement vis-à-vis des principes de l'islam demande
une approche dynamique.
L'essai qui suit donne une explication du
dynamisme de Coran qui, selon ses propres enseignements, voit certaines de ses
règles annulées dans le temps et de nouvelles adoptées sur la base du progrès
et des réalités de l'époque.
J'espère que vous trouverez cela utile.
Cordialement
Le dynamisme du Coran
Contre la
vision statique de l'islam et les interprétations extrémistes du Coran
défendues par les mollahs en Iran et d'autres groupes intégristes, chiites comme
sunnites, l'OMPI a d’emblée transmis une vision alternative, une vue
principalement initiée par Mohammed Hanifnejad à la création et dans les
premières années de l’OMPI sous le chah, et qui a ensuite été développée à la
fin des années 1970 et au début des années 1980 par Massoud Radjavi.
L'alternative qu’incarne l’OMPI comprend donc une interprétation dynamique et
progressiste de l'islam qui voit le Coran comme un témoignage de foi vivant,
suffisamment adaptable pour guider les musulmans à travers les défis et les
épreuves de leurs propres vies, ainsi qu’à travers les vicissitudes de
l'histoire. Enraciné dans la liberté et la pleine égalité des hommes et des
femmes, l'islam que prône l’OMPI est celui qui défend le pluralisme, la laïcité,
une auto-gouvernance démocratique, et très à l'aise dans le monde moderne. À
cet égard, l'OMPI reste à l'avant-garde de la pensée politique musulmane
contemporaine dans son plaidoyer en faveur de la séparation de la religion et
de l'Etat.
En tant qu’une des grandes religions
monothéistes du monde, l'islam englobe un système philosophique très riche,
avec une vue d'ensemble de l'existence, de la société et de l'histoire, plutôt
qu'un catalogue calcifié et excessivement punitif de décrets, comme cela paraît
si souvent avec les intégristes. L'islam articule chacun de ses concepts et
principes fondamentaux au sein d'une philosophie globale de Towhid, ou unicité,
qui à son tour fournit la base de la croyance musulmane dans l'unité
essentielle et l'unité de l'univers, en tant que la création de Dieu.
Le texte central de l'islam est le Coran, composée
de versets que les musulmans considèrent comme les mots de Dieu révélés au
Prophète Mohammad. Le dynamisme de l'approche que fait l’OMPI de l'islam
découle d'une distinction cruciale établie dans le Coran entre deux types
différents de versets : les mohkamat et les motashabihat. Mohkamat,
pluriel du mot « mohkam », vient de la racine « al-hokm »,
qui signifie «juger entre deux choses ». Les Mohkamat sont donc les
principes fondamentaux de l'islam, précis et immuables, qui contiennent
l'essence des conceptions de l'islam.
Motashabihat, pluriel de « motashabih », vient de la
racine Ishtabaha, qui signifie «être douteux ». Les Motashabihat
sont donc des injonctions qui concernent les méthodes et les règles de conduite
de la vie quotidienne relative, dynamique et flexible. En tant que tel, les Motashabihat
ne sont jamais rigides, se révèlent plus comme des lignes directrices pratiques
que des principes, qui peuvent et doivent être adaptées au progrès humain, au
progrès technologique et aux normes sociales changeantes des temps, tout en
préservant l'essence unicitaire et l'esprit de l'islam.
Techniquement parlant, parmi les graves
erreurs d’interprétation formulées par Khomeiny et les mollahs qui l'ont suivi,
ainsi que par d'autres intégristes et extrémistes dogmatiques, il y a celle de
confondre délibérément les versets mohkamat avec les motashabihat
dans leur interprétation du Coran, transformant ainsi tous les décrets,
préceptes et règles temporaires et historiquement occasionnels, en principes
immuables. Cela contredit non seulement les définitions et les catégories établies
par le Coran, mais permet également aux mollahs en Iran et à d’autres intégristes
de coller les appendices historiques de décrets obsolètes au Saint Coran pour
servir leurs propres fins. Pourtant, dans la sourate 3, « la Famille
d'Imran », le Coran dénonce explicitement toute tentative de confondre les
principes fondamentaux avec les règles transitoires. Il avertit que coller aux
versets allégoriques des motashabihat revient à être entraînés dans un
tourbillon, dans lequel ceux qui ont faibles d’esprits et malintentionnés se
noieront.
La vision dynamique de l'islam adoptée par
l'OMPI est donc fondée sur la méthodologie exprimée par le Coran et fait valoir
que l'islam authentique est ouvert et s’adapte aux changements socio-historiques,
politiques, culturels et économiques, qui à leur tour ouvrent la voie au
progrès social. En tant que religion qui encourage activement le progrès humain,
l’accomplissement et la rédemption aux yeux de Dieu, l'islam englobe non
seulement les progrès de la science, de la technologie et de la civilisation,
mais les favorise et les célèbre.
Les principes de base de la théologie chiite,
branche de l'islam décrétée par la Constitution iranienne comme religion
officielle, accentuent ce point. Le concept de l'ijtihad, à savoir la
compréhension et la mise en œuvre des versets motashabihat par des
interprètes qualifiés, rend impératif pour les érudits islamiques de développer
des méthodes et des règles appropriées durant les périodes où ils vivent. Ce
mandat, contrairement aux vues propagées par les mollahs despotiques, n’est pas
le domaine exclusif du clergé. Au contraire, il relève de la responsabilité de
tous les musulmans avec la connaissance nécessaire de l'islam. La nécessité de
l'ijtihad encourage donc la participation de tous les musulmans dans
l'apprentissage des concepts de l'islam et leur implication dans la formulation
et la mise en œuvre des politiques et des décisions touchant la vie civique et
politique.
Par exemple, dans son récit des vingt-trois
ans de la mission du Prophète Mahomet, le Coran affiche un certain nombre de
versets déclarés mansoukh, ou « périmé ». Certains versets sur
les questions sociales, économiques et morales des premières années du Prophète
ont été modifiés, conformément aux progrès de la société et de la culture, en
faveur de nouveaux versets plus aptes à traiter de ces questions, et ils ont
été révélés au Prophète plus tard dans sa vie. Cela contribue à expliquer
pourquoi seulement 600 versets du Coran, moins de 10 % du total, traitent de
décrets et suggèrent que le but du Coran n’est pas de légiférer la société et
l'humanité à leur place. Le Coran est plutôt venu, comme il le déclare, pour libérer
de leurs chaînes les êtres humains déjà soumis par des dirigeants et des lois
oppressives, afin qu'ils puissent élaborer leurs modes de vie compatibles avec
leur époque, lieux et cultures, libre de changer, d’évoluer et de progresser.
La différence la plus frappante entre la
vision de l’islam de l’OMPI et celle des intégristes, est la position de la
première sur le libre arbitre et le choix individuel. En premier lieu, le Coran
stipule qu’en tant que créatures de Dieu, tous les êtres humains sont égaux,
sans distinction de sexe ou d’origine. Il poursuit en disant que le libre
arbitre et le libre choix sont les principales caractéristiques qui différencient
les êtres humains des animaux. Les individus sont donc libres de décider pour
eux-mêmes ce qui les rend responsables de leurs actes. Cette notion de
responsabilité personnelle établit à son tour le cadre de la notion coranique
de « taqva », qui peut être traduite à la fois par « sens
des responsabilités » ainsi qu’« adaptation aux valeurs humaines les
plus élevées ». Atteindre un sens toujours plus grand des responsabilités
pour soi-même et les autres est un thème majeur du Coran, explicitement décrété
comme un bien individuel et collectif, une quête que tout le monde doit suivre.
Lorsque ces principes sont combinés avec le
mandat de l'ijtihad/interprétation à laquelle tous les musulmans doivent
participer pour comprendre et appliquer comme il se doit les versets motashabihat
du Coran, il est évident que l'islam permet aux gens de tous les jours de
prendre les décisions nécessaires sur leur mode de vivre et fait de la
souveraineté populaire la source de légitimité politique et de gouvernement. En
fait, le Coran, les traditions du Prophète Mahomet et d'autres figures
éminentes, comme le premier imam chiite Ali Ibn Abi Taleb, tous soulignent la
nécessité de placer le pouvoir entre les mains du peuple. Ces enseignements qui
sont abondants dans la théologie islamique et mettent en évidence l'importance
du progrès, de la justice sociale et économique et du respect des droits de
l'homme, font partie d'une tradition de pensée qui remonte à plus de quatorze
siècles.
Comparativement, les intégristes ne
reconnaissent pas la liberté de choix ou l'égalité et rejettent même la notion
de responsabilité humaine. Dans le contexte iranien, le Vali-e-Faghih,
le guide suprême, est vice-régent de Dieu sur Terre. Il tire son autorité
uniquement de Dieu et donc ne doit rendre des comptes à personne ni à aucun
pouvoir dans ce monde. C’est plutôt le guide suprême qui décide seul quelles
lois sont divinement sanctionnées et ensuite les impose, vu que tous doivent se
soumettre à son autorité absolue. En tant que tel, l’intégrisme ne considère pas
les personnes comme des adultes libres, autodéterminés ou des individus
autonomes mais plutôt comme des mineurs limités ou des enfants, incapables de
prendre leurs propres décisions sur des questions d'importance et dont le
devoir primordial dans la vie est d'obéir. Il est révélateur à cet égard que
dans son livre sur « la loi islamique », Khomeiny a assimilé la
relation entre souverain et ses sujets à celle d’un tuteur et des enfants.
L'OMPI soutient que son interprétation
dynamique de l'islam capte mieux la vérité et l'authenticité de la religion
mahométane. Basé sur les notions de liberté, d'égalité, de responsabilité et de
souveraineté populaire dans le Coran lui-même, c’est une vision résolument
démocratique qui croit en l'égalité de tous les peuples, l'égalité des femmes
et des hommes, les droits des minorités ethniques et religieuses, et la séparation
de la religion et de l'État. Cette compréhension de l'islam est adoptée par
l'OMPI depuis 50 ans et c’est l'islam qui prône la laïcité, le pluralisme, la
démocratie et l'auto-gouvernance. C’est un islam totalement à l’aise dans la
modernité, ouvrant les bras aux sciences et à la technologie, aux institutions
nationales, internationales et arrangements sophistiqués, et facilement
adaptable aux innombrables opportunités et aux défis du monde moderne. Mêlé à
une culture de compassion et de compréhension, de miséricorde et de pardon, c’est
un islam ouvert et sensible à nos revendications communes d’'humanité et à nos
chemins divers du progrès, encourageant ses voisins, partenaires et alliés, et
surtout de justice. Le nouvel islam est l'islam aujourd'hui et de demain, celui
qui va voir le renversement du règne tyrannique et sanglant des intégristes, et
le pouvoir légitimement restauré du peuple iranien.
Dr. Sanabargh Zahedi
Juriste Islamologue
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